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Le mentir vrai - L’expression du « mentir-vrai » est tirée d’une nouvelle d’Aragon, écrite en 1964, un recueil de récits dans lesquels l’auteur revient sur ses années d’enfance par un subtil jeu narratif mélangeant fiction et réalité. Elle résume sa vision de l’écriture romanesque, conçue comme dévoilement du réel (le vrai) par la fabulation (le mentir).

La narration consiste en effet, selon lui, dans la transformation de faits réels dans une composition fictionnelle qui, bien que produit d’un mensonge et donc « menteuse », transporte une vérité qui s’approche davantage de la réalité que la reproduction apparemment directe et immédiate de la réalité à l’état brut.

On ne s’étonnera donc pas qu’Aragon, un homme multiforme et un écrivain qui n’hésite pas à s’avancer masqué, soit considéré souvent comme un faussaire ou un imposteur et que, par conséquence, il ait choisi cette alliance oxymorique entre mentir-vrai et réalisme, pour analyser les jeux et le je de l’écrivain.

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La place de cette expression dans l’habituel avertissement au lecteur, selon lequel toute ressemblance serait fortuite, se justifie d’une façon particulière pour un roman policier dont l’essentiel est de démêler l’enchevêtrement des fils qui mènent à la vérité ou au mensonge. C’est l’intérêt de l’intrigue.

Mais la vérité sur la nature humaine en ressort également éclairée : les mensonges, les faux-fuyants, les non-dits, les omissions et tous autres actes manqués des personnages nous les dévoilent plus sûrement que ne le font les apparences qu’ils donnent. C’est l’intérêt psychologique et moral.

Reste cependant l’intégration de l’histoire dans le réel brut : c’est tout le fruit de la documentation et l’intérêt « touristique » et sociologique de l’œuvre.

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L’art, qu’il soit littéraire ou autre, use donc de la vie comme matière brute qu’il doit recréer, modeler, mieux, inventer, à la manière du « mensonge désintéressé » d’Oscar Wilde. Ne serait-ce, parce qu’il arrive parfois, remarquait Corneille, que la réalité vraie paraisse incroyable au contraire d’une fiction vrai…semblable.

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